On ne communique pas beaucoup, autour de la 5G, chez les opérateurs français… Et pour cause : les débuts de la 5G sont un flop !
Ses concurrents (Bouygues Telecom, Orange et Free) lui emboîtent le pas les semaines suivantes. Les opérateurs communiquent sur de celui qui a la plus grande couverture, et invitent, à grands coups de pubs 4 par 4, les consommateurs à basculer au plus vite vers des smartphones et des forfaits 5G…
“Ça commence…”
Seulement voilà. Plus d’un an est passé depuis le lancement, et les forfaits 5G ne décollent pas. Ce qui n’est pas une surprise non plus. En effet, quand la 4G a été lancée il y a dix ans, ses débuts ont été balbutiants également. On connaît la suite… C’est pourquoi les opérateurs ne paraissent pas non plus très préoccupés. “Ça commence…”, répétait, comme un mantra, le directeur général d’Orange sur BFM Business, début février.
En effet, les opérateurs continuent à installer des antennes 5G sur leurs réseaux. Le déploiement avance même à bon rythme. Plus de 30 000 sites ont été autorisés en France par l’ANFR (Agence nationale des fréquences). Les deux tiers sont déclarés techniquement opérationnels par les opérateurs de téléphonie mobile. L’ANFR précise tout de même que “la 5G reste pour le moment cantonnée aux grands centres urbains” que “les dernières grandes métropoles régionales commencent à être couvertes”.
La bande coeur de fréquence
Selon les chiffres, ici, provenant de l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse), au 30 septembre 2021, Free compte 12000 sites 5G, Bouygues Telecom, 5003; SFR, 3160 et Orange, 2473. Cependant, si l’on se concentre sur la bande coeur de fréquence (3,5 GHz), celle qui permet d’apporter la meilleure expérience aux clients en terme de débit et de réactivité, tous les opérateurs se tiennent dans un mouchoir de poche, entre 2177 (Orange) et 1691 (Free).
C’est donc Orange qui a la meilleure couverture 5G. Le groupe affirme “être présent dans près de 900 communes” et couvre “plus de 38% de la population”. Bouygues Telecom revendique “toutes les grandes villes de France Métropolitaine et plus de 6 600 communes”. Free, lui, avance être “accessible dans plus de 9 648 communes” et couvre “79% de la population couverte par la 5G en France”, mais en basse fréquence (700 MHz). Quant à SFR, selon eux, “la 5G est une réalité dans plus de 4 400 communes françaises”.
Le saviez-vous ?
En 4G, le taux de couverture est de 99%, quel que soit l’opérateur. En termes d’installation, la 5G est donc encore loin derrière sa grande sœur.
Un débit plus important en 5G, mais non décuplé
Mais, la couverture n’est pas le seul bémol, la 5G promettait un débit multiplié par dix, la possibilité de connecter de milliers d’objets et un temps de latence réduit. Mais il va falloir patienter un peu. Jusqu’à 2023, et la modification des équipements informatiques. Les tests effectués par l’Arcep montrent un débit plus important en 5G, mais non décuplé. Les promesses ne sont pas encore au rendez-vous…
Bouygues Telecom, Orange et SFR annoncent des débits plus importants de l’ordre de 50% par rapport à la 4G, mais on est encore loin des débit promis… Free, lui, a le plus bas. La faute à un choix stratégique et technique très discutable. Qui s’est avéré préjudiciable pour ses clients mobiles 5G. Alors que ses concurrents investissent dans la bande cœur de fréquence (3,5 GHz), Free a fait le choix de concentrer ses efforts sur la basse fréquence (700 MHz). Si cette stratégie a permis à la société de Xavier Niel de se déployer plus rapidement sur le territoire que les autres opérateurs, le débit en pâtit. La basse fréquence est incapable techniquement de fournir les mêmes prestations que la 3,5 GHz. La preuve en est que, selon une étude de l’Arcep, un abonné Free en 5G a moins de débit qu’un… autre abonné Free en 4G. L’opérateur s’est empressé de remettre en cause la méthode de calcul.
La fibre plutôt que la 5G
En effet, ce manque d’enthousiasme pourrait s’expliquer par la pandémie. Les confinements et couvre-feux répétés ont plus poussé les ménages français à investir dans la fibre que dans la 5G. Le télétravail, l’école à la maison et le visionnage de vidéos en streaming ont changé les habitudes, et créé de nouvelles priorités.
En revanche, les craintes pour la santé véhiculées, au début du déploiement des antennes, semblent s’être estompées. Et les anti-5G sont peu audibles.
Un récent rapport de l’Anses (Agence nationale de la sécurité sanitaire) a conclu qu’il est “peu probable” que le déploiement de la 5G entraîne de nouveaux risques pour la santé, mais précise, prudemment, qu’il est nécessaire également d’avoir plus de recul afin d’accumuler plus de données.
Même son de cloche du côté de l’ANFR (Agence nationale des fréquences). Qui, fin 2021, a réalisé une étude sur 1500 pylônes, et a constaté une très légère augmentation de l’exposition aux ondes pour le public.
Connexions plus réactives et sécurisées
Autre raison possible : la 5G nécessite de s’équiper d’un smartphone compatible, plus récent, donc plus onéreux. Même si cela se démocratise : aujourd’hui, un smartphone sur deux vendu est compatible 5G, avance-t-on du côté d’Orange. Quant aux abonnements, hormis Free qui propose les deux technologies au même prix, ils sont plus chers. Selon SFR, aujourd’hui, un forfait sur quatre vendu est en 5G.
Enfin, si le passage de la 3G à la 4G fut un vrai bond technologique avec la vidéo mobile, pour la 5G, l’évolution n’est pas aussi perceptible pour le grand public. Du moins pour le moment.
Les opérateurs réclament de la patience, et annoncent qu’à partir de 2023, avec les nouvelles bornes de fréquence, on verra, progressivement, la différence En effet, avec les nouveaux équipements 5G, la technologie mobile proposera, au-delà d’un débit ultra rapide, de nouvelles possibilités. Les connexions seront plus réactives et sécurisées, ce qui est un réel avantage concernant la connectivité pour les entreprises.
Le premier port français connecté en 5G
Les entreprises sont d’ailleurs le véritable cœur de cible de la 5G. Qui a, avant tout, été développée pour les industriels, pour le B2B. Mais là encore, le bât blesse. Les débuts sont timides, certes, mais il faut patienter jusqu’à 2023 pour que le réseau 5G puisse exprimer tout son potentiel, préviennent les opérateurs.
Certaines villes, comme Nice, ont déjà fait le choix de la 5G afin d’attirer de nouvelles entreprises.
Le saviez-vous ?
En mars 2021, Orange a connecté Le Port de Havre en 5G, devenant ainsi le premier port français connecté en 5G. L’opérateur, accompagné de Siemens, Nokia, EDF, et de la Communauté urbaine du Havre et du port du Havre, ont fait des docks havrais un véritable laboratoire expérimental de la 5G.
Dans l’Eure également, Orange a connecté en 5G, en septembre dernier, l’entreprise Schneider Electric. Il s’agit de la première usine branchée en 5G en France. Pour le moment, il s’agit de “fréquences expérimentales” attribuées par l’Arcep. Mais qui ont déjà été portées leurs fruits puisque, selon un responsable de Schneider Electric, cité par l’AFP, “grâce à ses très hauts débits et une faible latence, permise notamment par l’installation d’un mini-centre de données sécurisé sur le site, la 5G a déjà permis d’augmenter la productivité de l’usine”.
À Angers, la 5G va être utilisée pour contrôler la pollution de l’air. Cet été, les premiers capteurs de mesure de la pollution seront installés afin que le système soit totalement opérationnel fin 2023. Ce dispositif “pourrait permettre de rediriger une partie du trafic, d’ouvrir des voies complémentaires ou de donner de l’information aux piétons sur le niveau de pollution”, explique, dans Les Echos, Antoine Roussel, directeur général d’Alsatis (opérateur de télécoms qui participe au projet).
Même si des projets sont en cours, il n’en reste pas moins que la 5G séduit peu les industriels français. C’est pourquoi, afin d’y remédier, le gouvernement Castex a sollicité une “mission sur la 5G industrielle”. Les recommandations sont attendues pour mars…
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