La domotique, qu’est-ce que c’est ?
Selon le Larousse, la domotique désigne “l’ensemble des techniques visant à intégrer à l’habitat tous les automatismes en matière de sécurité, de gestion de l’énergie, de communication, etc.”. Apparus dès le début des années 1980, ces dispositifs domotiques ont eu des débuts balbutiants, car très coûteux et considérés majoritairement comme des “gadgets”.
En 2018, plus de 16 millions de produits Smart Home ont été vendus en Allemagne, Grande-Bretagne et en France, représentant une hausse de 11% en un an selon l’Institut d’études GFK. C’est notamment la centralisation des interfaces qui a permis cette récente explosion des ventes : s’il y a quelques années chaque objet connecté devait être piloté indépendamment, les assistants vocaux comme Google Assistant ou Siri d’Apple permettent aujourd’hui d’automatiser et de contrôler l’ensemble des objets connectés d’un foyer au même endroit.
La domotique est une dénomination qui recouvre une multitude d’appareils connectés de diverses natures :
- enceintes ;
- téléviseurs ;
- appareils électroménagers (réfrigérateur, lave-linge, lave-vaisselle, four…) ;
- dispositifs de sécurité (caméras de surveillance, interphones, détecteurs de mouvements, alarmes…)
- ampoules ;
- stations d’analyse de la consommation énergétique du foyer, de la qualité de l’air intérieur ;
- potagers d’appartement ;
- miroirs ;
- pèse-personne ;
- etc.
La domotique offre donc des possibilités d’utilisation infinies, selon les besoins du foyer et les paramètres sur lesquels celui-ci veut agir. Mais malheureusement, elle amène aussi des possibilités infinies de failles de sécurité… Les solutions domotiques seraient-elles moins miraculeuses que promises ?
Une maison en accord avec son environnement
Les projections concernant les “maisons du futur” ont largement évolué avec le temps. La comparaison des deux vidéos suivantes est édifiante : sur la première, datant de 1957, on voit la “maison du futur” imaginée par Disney et visitable dans son parc d’attractions californien. Sponsorisée par Monsanto, celle-ci témoigne d’une idée du progrès très centrée sur la notion de confort de l’humain et d’adaptation de l’environnement aux désirs des individus. Le matériau star de cette maison futuriste : le plastique !
L’autre vidéo, datant de 2017, montre une modélisation 3D d’Aïon 2050, “maison du futur” présentée au CES 2017 par IGC Construction et couronnée du prix spécial du jury du Challenge 2016 des Maisons Innovantes. Changement radical de perspectives, puisqu’ici c’est l’harmonie avec l’environnement qui est mise au centre des préoccupations. L’ambition de l’architecture et de l’aménagement de cette maison est de s’adapter au mieux aux contraintes naturelles tout en restant connectée et en maintenant un confort de vie optimal à ses habitants.
En effet, nombreux sont les dispositifs de domotique qui témoignent aujourd’hui d’une volonté de réduire la consommation d’énergie du logement et tirer profit des ressources naturelles disponibles, comme l’énergie solaire. Cela répond à des préoccupations écologiques actuelles, bien entendu, mais aussi économiques : l’énergie représente selon l’Insee 8,4% des dépenses des ménages. Jouer sur ce levier permettrait donc aux foyers de gagner considérablement en pouvoir d’achat.
Les dépenses liées au chauffage, représentant en moyenne 62% de la consommation énergétique des foyers (selon EDF), peuvent par exemple être considérablement réduites par l’adoption de thermostats intelligents. Ceux-ci permettent de faire des économies en automatisant la réduction de la température lorsque le temps le permet, ou en votre absence. La majorité de ces dispositifs dispose également de capteurs capables de détecter l’ouverture d’une fenêtre, et donc d’éteindre le chauffage pour éviter les gaspillages d’énergie.
Nombreux sont les autres objets connectés visant à réduire la consommation énergétique : des ampoules et autres éclairages connectés par exemple, qui peuvent s’adapter à la luminosité extérieure, s’éteindre automatiquement si aucune présence n’est détectée dans la pièce… Ainsi que des stations d’économies d’énergie, comme celles développées par Sense (start-up partenaire d’Engie), détectant les appareils les plus énergivores du foyer sans avoir besoin de capteurs.
Même les distributeurs d’électricité et de gaz s’y sont mis : en plus de se positionner comme des fournisseurs d’énergie moins chers, ils proposent désormais des compteurs connectés, devenus d’ailleurs obligatoires pour tous les foyers (ce qui ne leur vaut pas que des amis) : Linky pour l’électricité, Gazpar pour le gaz. La promesse : réduire les dépenses d’énergie des foyers en leur donnant accès au détail de leur consommation par pièce et par appareil en temps réel, et optimiser la production et la distribution des énergies en affinant les statistiques collectées par les distributeurs et les fournisseurs.
Des innovations d’autant plus importantes que les réglementations vont aujourd’hui dans le sens d’une optimisation maximale de la consommation énergétique : alors que la Réglementation Thermique 2012 fixait un quota maximal de dépenses d’énergie pour les bâtiments neufs, la Réglementation Thermique 2020 passe un nouveau cap en leur imposant d’être énergétiquement positifs.
Bâtiments à énergie positive, bâtiments passifs... Qu'est-ce que ça veut dire ?
Un bâtiment passif est un habitat à très basse consommation d’énergie, qui met notamment à profit l’énergie solaire pour son chauffage. Un bâtiment à énergie positive produit plus d’énergie qu’il n’en consomme, notamment par la pose de panneaux photovoltaïques ou tout autre système de production d’énergie renouvelable.
Une maison qui assiste les personnes en perte d’autonomie
L’un des enjeux majeurs de cette décennie sera à n’en pas douter le développement de solutions pour les publics en perte d’autonomie : personnes âgées mais aussi handicapées. Les utilisations “classiques” de certains dispositifs connectés (volets, luminaires, etc.) peuvent déjà être d’une grande aide pour prolonger leur autonomie. Mais les prochaines années pourraient voir apparaître de plus en plus d’objets spécifiquement imaginés pour répondre à certains obstacles rencontrés par des personnes en situation de handicap.
En effet, aujourd’hui, les monte-escaliers n’ont plus l’apanage des solutions automatisées pour les personnes à mobilité réduite ! Il existe par exemple des fauteuils roulants intelligents, enregistrant les trajets habituels des utilisateurs, informant son utilisateur de l’accessibilité des infrastructures qui l’entourent et pouvant réaliser des rapports médicaux en temps réel. Certains de ces fauteuils peuvent même être commandés par la pensée (détection des ondes cérébrales et du mouvement des yeux), ce qui peut laisser espérer de nouvelles possibilités d’autonomie pour les personnes tétraplégiques notamment.
Comment la domotique peut aider dans l'adaptation du logement à la perte d'autonomie, vieillissement et au handicap. Deux exemples:https://t.co/89ivqxoaNh (2011) https://t.co/GnZpD233YI (2018) @J_Denormandie @EmmanuelMacron @FdeRugy @M_MeynierM @LaREM_AN @OlgaGivernet #loiELAN
— Wandrille 🌍🇪🇺 🇫🇷 (@WandrilleH) September 27, 2018
Des bracelets et médaillons connectés peuvent également prévenir une personne de confiance ou un service dédié directement en cas de chute ou à la demande de la personne équipée. De quoi prolonger le maintien à domicile de certaines personnes âgées en rassurant leurs proches et en leur permettant d’avoir accès à une assistance immédiate en toutes circonstances.
Des systèmes de sécurité à la pointe de la technologie
Au-delà des préoccupations écologiques, de l’aide aux personnes vulnérables ou des simples questions de commodité, l’enjeu sécuritaire joue un rôle prépondérant dans le développement de la domotique – tant chez les particuliers que chez les professionnels. L’institut GFK évoque en effet une “nette prédominance des produits Sécurité et Confort de vie” chez les Français interrogés en 2017.
La domotique permet ainsi d’installer des systèmes de vidéosurveillance intelligents chez soi. Les caméras connectées sont dotées de disques durs permettant de stocker plusieurs heures de vidéos, lesquelles sont visionnables en direct et de partout via une application mobile ou une interface en ligne dédiée. Beaucoup disposent également de détecteurs de mouvements plus ou moins “intelligents”, certains allant même jusqu’à pouvoir distinguer le passage de l’un de vos animaux de compagnie de celui d’un intrus ! Il existe également des serrures connectées, activables via Wi-Fi ou Bluetooth, des interphones connectés, des détecteurs de fumée connectés, des baby-phones connectés… La liste n’en finit pas !
Des dispositifs a priori totalement dissociés des notions de protection du domicile peuvent également trouver des applications sécuritaires : par exemple, le déclenchement automatique ou aléatoire des lumières ou volets électriques dans le but de tromper les cambrioleurs en simulant une présence à votre domicile.
Une sécurité en trompe-l’œil ?
Malheureusement, il semblerait que la sécurité promise par les appareils domotiques s’avère parfois être un leurre. La multiplication des objets connectés découlant de la domotisation d’un logement implique forcément une plus grande vulnérabilité à la cyber-criminalité.
Et pour cause : aux origines de la domotique, les fabricants ont privilégié la recherche et le développement de l’ergonomie des produits plutôt que la sécurisation de leurs interfaces. Pour l’expliquer plus simplement : les codes d’accès à certaines caméras de sécurité connectées pouvaient être retrouvés très facilement en ligne par des personnes mal-intentionnées. Le cryptage était soit très facile à contourner, soit carrément inexistant.
De plus, un vide juridique existait quant à la responsabilité des entreprises en matière de cybersécurité des produits et services proposés – vide comblé en 2019 par l’EU Cybersecurity Act, imposant une certification officielle aux produits domotiques.
Une législation d’une importance cruciale lorsque l’on sait les menaces que de telles failles de sécurité peuvent faire planer sur les utilisateurs. Selon Nicolas Arpagian, directeur de la stratégie et des affaires publiques chez Orange Cyberdefense, celles-ci sont au nombre de quatre :
- L’utilisation des ressources informatiques des objets ;
- La violation des données des utilisateurs ;
- La prise de contrôle des équipements à distance ;
- La neutralisation à distance des systèmes de sécurité connectés.
Des menaces bien réelles
Plusieurs piratages massifs d’objets connectés ont déjà eu lieu. Le virus Mirai, en 2016, a infecté des centaines de milliers d’objets connectés dans le but (atteint) de saturer Dyn, gestionnaire des noms de domaine d’Amazon, eBay, Netflix, Spotify et Twitter. Ring, sonnette connectée d’Amazon, a aussi été piratée en 2019 : les identifiants et mots de passe de 1 562 utilisateurs s’étaient retrouvés commercialisés sur le dark web. Les acheteurs pouvaient ensuite faire parler ces sonnettes pour terroriser leurs propriétaires… Et obtenir une rançon ?
Faut-il renoncer aux objets connectés ?
Il est important d’être conscient que tout objet relié au réseau Internet, quel que soit le niveau de sécurité promis, court toujours le risque d’être un jour piraté. L’arbitrage est ensuite le vôtre : équiper son domicile en domotique peut présenter de nombreux avantages non négligeables et constituer un apport très intéressant dans votre quotidien, quelle que soit votre situation.
Internet est un outil absolument formidable, vecteur d’informations, de savoirs ; la domotique met cet outil à profit pour vous permettre “d’augmenter” votre maison. Mais retenez que dans ce domaine, comme dans toutes vos interactions sur Internet, il est déterminant d’agir avec prudence et de mettre toutes les chances de votre côté en vous renseignant sur les bonnes pratiques à adopter pour mettre votre vie privée à l’abri de toute intrusion. Vous trouverez les principaux réflexes à avoir pour sécuriser vos objets connectés dans cet article de Constance Bommelaer de Leusse, Directrice des Politiques Publiques de l’Internet Society.
Pour aller plus loin
À feuilleter
- La Revue Dessinée, #14 (hiver 2016-2017), “Wifi à tous les étages” (p. 82-109), SOULCIÉ Thibaut & UNTERSINGER Martin ;
À lire en ligne
- Journal du Net, “La domotique, nouveau terrain de jeu des cybercriminels”, 14/01/20
- L’Energeek, “La domotique : quels sont les enjeux sur le bâtiment bas carbone ?”, 31/08/19
- Le Parisien, “Autonome, connectée, écolo : bienvenue dans la maison du futur”, 13/05/19
- GFK, “Smart home: les assistants vocaux donnent vie au marché”, 31/08/18
- GFK, “IoT : Plus de 5 millions de produits achetés et 1 milliard € de revenu généré en 2017”, 06/04/18
- Science Post, “À quoi ressemblera la maison du futur ?”, 22/08/17
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